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Les "cribles" de Lehmer

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D. H. Lehmer a amélioré, en 1930, le test de Lucas [1] permettant de déterminer si un nombre est premier. Le test de Lucas-Lehmer reste d'actualité pour tester la primalité de grands nombres.

D. Lehmer a également conçu et réalisé, à partir de 1926, plusieurs machines permettant de mettre en oeuvre ce test.

Le principe des premières machines était spartiate. Des chaînes de bicyclettes (!) tournaient sur des roues dentées, portant toutes le même nombre de dents (10). Ces roues étaient solidaires d'un arbre les entraînant au même rythme. Les nombreuses relations de congruences à tester étaient mécanisées par la coïncidence de... boulons rajoutés sur les chaînes. Des contacts électriques permettaient d'apprécier l'alignement des chaînes.

La machine originale a été détruite. R. Canepa (Université de Carnegie-Mellon) en a construit une réplique. Elle est incomplète sur l'image ci-dessous :



Sur le modèle achevé, on distingue la barre de contacts mise en place.



Voyons ce dont la machine était capable. Soit à représenter n = (1020 + 1)/(104 + 1) = 9 999 000 099 990 001 sous la forme a2 - b2 = (a+b)(a-b) en vue de sa factorisation, comme dans le cas de la machine Carissan. Après un pré-traitement mathématique réduisant le problème à l'examen de 8 familles de congruences modulo 49, l'appareil est mis en action. L'arbre, mû par un moteur électrique, tourne à 300 tr/min. Ce sont donc 3000 nombres par minute qui sont "testés" sur chaque chaîne. Après 2 heures de fonctionnement, la machine s'arrête et la lecture de sa position permet de déduire a = 2 983 262 201, b = 2981585880 d'où N = (a+b)(a-b) = 1 676 321 x 5 964 848 081.

D. Lehmer n'eut de cesse d'améliorer les performances de ses appareils. En 1932, la détection des congruences fut confiée à des cellules photoélectriques détectant l'alignement de trous dans des roues dentées. Le nombre de tests ainsi effectués passait à 300 000 par minute.



Plus tard, il construisit une version "miniaturisée". Cette fois, les chaînes de vélo étaient remplacées par du film 16mm, la détection étant toujours photoélectrique. Les performances étaient en retrait, cette petite machine visait à résoudre des problèmes assez simples, avec une mise en place facile.



Ensuite, Lehmer construisit un modèle électromécanique avec des tubes à vide et des lignes à retard. Puis (1965) vint un modèle purement électronique. Il faisait un bien meilleur travail que les monstrueux ordinateurs de l'époque. Selon les propres termes de D. Lehmer :
 
"Par comparaison avec l'IBM 7094 [il] fait bonne figure, particulièrement sur le plan économique. Il est environ 10 fois plus rapide que le 7094, et son fonctionnement revient à environ 2 cents de l'heure."

Les années qui suivirent, Lehmer put continuer ses travaux en utilisant l'ENIAC puis les plus puissants ordinateurs contemporains, Cray 1 et ILLIAC IV.
 
Le Pr. D. Lehmer est décédé en 1991.

Les mathématiques aujourd'hui, collectif, Belin - Pour la Science, 1984


Note

[1]  n est premier ssi il existe b tel que bn-1 = 1 [mod n] mais b(n-1)/p non congru à 1 modulo n pour tout diviseur premier p de n-1.